Brûler 1500 dollars pour afficher «SA LIBERTÉ», c’est «cher payé» pour une cause totalement larvée !
- René Bouchard
- 4 févr. 2021
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : 7 mars 2021
Comme la plupart des observateurs de la scène politique, je me questionnais sur l’efficacité de couvre feu, tel qu’annoncé le 8 janvier par le gouvernement Legault. Comme la plupart d’entre-nous, l’idée même d’ajouter une nouvelle restriction sur la lourdeur du confinement, représentait une nouvelle directive qui aurait comme effet de brimer notre liberté.
Néanmoins, l’on constatait que le nombre de gens infectés ne diminuait pas (2 400 cas / jour) et que les hospitalisations étaient à la hausse, force était d’admettre que cette consigne pourrait s’ajouter à l’arsenal des outils utilisés pour combattre la pandémie. Or, puisque les lieux de culture, commerces et restos étaient déjà fermés, j’ai accepté de rester chez-moi.
Le vendredi 9 janvier, sur le coup de 20 heures, alors que toute activité extérieure est interdite, l’on assiste à des manifestations anti « on ne sait pas trop quoi » dans plusieurs villes du Québec. À Montréal, lorsque l’on observe les manifestants, il n’y a aucune affiche contestant les inconvénients du couvre feu, seulement quelques drapeaux du Québec portés par des gens qui scandaient « Liberté Liberté ! ». 17 constats d’infraction de 1550$ furent émis ce soir-là près du Métro Mont-Royal.
Idem en Estrie, des centaines de personnes ont été interceptés par les policiers et de ce nombre, 35 récalcitrants ont reçu un constat d’infraction. À l’instar de ce que l’on a pu remarquer à Montréal, aucune affiche ne semblait contester le couvre feu et c’est à se demander quel était le véritable motif de ces manifestations ?
On manifeste contre quoi au juste ?
À titre d’exemple, le Journal de Montréal, édition du 12 janvier a publié un texte avec le titre Les covidiots du couvre feu ont frappé partout, l’un des articles reproduit la photo d’une jeune fille arborant avec fierté sa contravention. «Visiblement fière de son « premier constat couvre-feu », une jeune femme de la région de Sherbrooke a publié samedi soir une photo d’elle sur les réseaux sociaux, en indiquant qu’elle «s’apprêtait à collectionner « avec fierté » les constats d’infraction.»

Voici le texte qu'elle a joint à sa photo publiée sur Facebook, copié de l'article du Journal de Montréal et reproduit ci-bas pour être lisible :
« Parce que si ma mère [ne] m’a jamais donn[é] de couvre-feu, c’est certainement pas M. Legault qui le fera [...] j’ai décid[é] de faire quelque chose pour MA LIBERTÉ », clame-t-elle dans sa publication.»
Comment interpréter ce message ?
Tentons d’y voir plus clair en commençant par la notion de «fierté». On peut être fier de quoi lorsque l’on récolte un ticket de 1500$ ?
Selon Le Larousse, quelques définitions du mot fierté : Caractère de quelqu'un qui se croit supérieur aux autres ; arrogance, hauteur, la seconde : Indépendance de caractère de quelqu'un qui a le sentiment de son honneur ; dignité, noblesse, amour-propre. Sentiment d'orgueil, de satisfaction légitime de soi ; Il tire une grande fierté d'avoir achevé son entreprise.
Si, tel que décrit dans la dernière phrase de cette définition, l’on peut tirer une grande fierté d'avoir réussi son entreprise, de quelle fierté peut-on se targuer à se promener dans une rue déserte le soir et attendre de se faire coller un ticket de 1500$ ?
Admettons qu’il y aurait trois possibilités ou hypothèses pour agir de la sorte :
Uno : La jeune femme désire empêcher M. Legault de «donner» des couvre-feux en
manifestant son désaccord mais -- paradoxalement -- elle acceptera, parce qu'elle n'aura pas
le choix, de payer les 1 500$ requis. Elle a (ou ses parents) les moyens de ses ambitions et
pourra exposer son nouveau «trophée» sur les réseaux sociaux.
Deuxio: Elle croit - naïvement - qu’elle pourra se dispenser de payer la somme pour une
raison quelconque (détresse psychologique, méconnaissance de la loi, etc.) et/ou allonger
les paiements sur une période indéterminée en invoquant l'incapacité de payer (???).
Tertio: En faisant « ses propres recherches » sur le web, elle s’est laissée convaincre que cette
pseudo-pandémie était liberticide et que cette contravention était illégitime puisque sa liberté
individuelle était bafouée. Il s’agit simplement de s’en plaindre auprès des instances de la
charte Canadienne des droits et des libertés, de se présenter en cour avec des textes inspirés
de son ami Rudolph ou simplement se joindre à son groupe pour une contestation collective.
Pour écouter ses directives cliquez sur l'image ci-bas. Vraiment pas compliqué ;-)
À cet égard, au Québec, deux recours distincts ont tenté d’invalider la loi.
D’abord, par l’avocat gatinois William Desrochers. < Il plaide que le gouvernement ne peut pas légalement renouveler les décrets sanitaires de 10 jours en 10 jours > - en y incluant celui du couvre feu - < sans soumettre ces mesures au vote de l’Assemblée nationale. > Une procédure technique qui ne garantit pas - même si elle recevable par la Cour supérieure - d’invalider la loi, donc, d’annuler le paiement des contraventions.
NOTE : En date du 8 février 2021, le recours de l'avocat William
Desrochers, a été débouté.
L’autre poursuite, signée par la Fondation pour la défense des droits et libertés du peuple visant l’abolition du couvre-feu, a été déposée au nom de deux plaignants qui ont reçu une amende après être sortis lors du couvre-feu.
Ils allèguent que la mesure leur a occasionné un < un sentiment d’emprisonnement, une augmentation considérable de [leur] stress, un sentiment de torture psychologique ainsi que de colère et frustration de voir [leurs] droits fondamentaux brimés >.
La mesure viole, selon la poursuite, le droit de tous les Québécois « de ne pas faire l’objet d’une détention arbitraire ». Outch ! Rien de moins.
Entre fabulation et réalité tordue.
Si j’ignore la réaction des juges sur la recevabilité des arguments allégués dans cette poursuite, j’imagine que cette plainte ne sera pas prise au sérieux, donc possiblement rejetée. Il y a des limites à exagérer les désagréments d’un couvre-feu à 20 heures le soir, en plein mois de janvier.
Il existe également d’autres regroupements qui contestent les mesures sanitaires au Québec. La défunte station Radio-Québec de Alexis Cossette-Trudel, grand collaborateur de QAnon, a été dernièrement éliminée de YouTube.

Action Coordination, un regroupement qui organise les
« marches du samedi» et qui propose, sur son site web pour le Québec, « De braver le couvre-feu tous les jours » de la première semaine de février.
D'autres groupes et associations réunies sous le collectif « Pas de solution policière à la crise sanitaire » songeaient à organiser, le samedi 6 février, une manifestation pour faire le bilan de cette mesure et contester sa reconduction. La coalition s’inquiète des « effets délétères » des mesures mises en place par la CAQ.

Finalement, la belle gagne d’SOS-Québec qui se sont présentés dernièrement sur des sites de vaccination pour décourager les gens et harceler le personnel soignant.
Et s’il fallait rogner vers les réseaux complotistes de France, cette page serait trop courte pour les énumérer. Bref, en tapant presque n’importe quoi dans la fenêtre Google, il y a 100 fois plus de chances de tomber sur liens insidieux et mensongers que des sites web ou médias reconnus pour leur contenu crédible et scientifiquement éprouvé. Un référencement hyper efficace et soutenu par des algorithmes bien maîtrisés, constituent la pierre angulaire de ces succès.
Deux canaux de communication distincts, deux visions du monde…
Dans les faits, la nébuleuse internet comporte plusieurs réseaux contrôlés par des influenceurs et gourous opportunistes se partageant -- plus souvent qu'autrement -- une vision libertaire de la société. Inspirées des extrêmes de la «droite» et/ou de la «gauche», les idéologies présentes sur le web constituent une forme de « réseau parallèle » distinct de celui des médias de masse qui eux, sont soumis à certains contrôles et de codes d’étique.
Il n’est donc pas étonnant que des centaines de personnes, s’informant principalement sur ces sites au contenu discutable, finissent par croire que les mesures sanitaires sont inutiles et qu’il est possible de contester une contravention en vertu d’arguments ne pouvant se qualifier dans une poursuite. En réalité, le contenu de ces sites, correspond exactement à ce que des gens veulent voir et entendre d'où l'effet «miroir», souhaité par les adeptes dans ces chambres d'échos interactives.
Heureusement, Facebook, Youtube et autres plates-formes numériques ont amorcé un nettoyage essentiel et bloqué des dizaines de sites liés aux théories du complot. Il était temps qu’un grand ménage soit effectué avant que les humains vivant sur notre planète ne deviennent complètement fous !
Au delà du « n’importe quoi » virtuel, il y a des victimes réelles…
Revenons à la jeune fille qui désire collectionner les contraventions. En admettant que ce comportement inusité soit tributaire de la troisième hypothèse citée précédemment, soit celle des effets néfastes de la désinformation des réseau sociaux, il faudrait reconnaître qu’elle n’est pas la seule à subir les conséquences de ces fourberies à grande échelle.
Sur sa page Facebook, elle se dit « libre maintenant et à jamais », malheureusement, elle pourrait se gourer. Puisqu'il ne s'agit pas d'un simple constat de quelques dollars attribué dans une manifestation regroupants des milliers de personnes, il y a fort à parier que son stratagème soit perçu comme une confrontation et/ou bravade avec les conséquences qui s'y rattachent. Lors de la remise de la contravention, les autorités policières ont sûrement procédé à l'enregistrement de ses coordonnées. Celles-ci pourraient circuler dans les systèmes comportant des bases de données partagées, dont possiblement (au conditionnel, évidement) celui la GRC, avec en prime, une photo récente de son visage publiée sur sa page Facebook. Sa fiche est désormais complète et possiblement transférée sur des « clouds » encryptés, ce qui complique l'effacement des données enregistrées. Il est donc envisageable que ces renseignements soient accessibles pour une période indéterminée.
Welcome dans votre nouvelle vie fichée, madame LA LIBERTÉ ;-)
Finalement, si ces manifestants-tes s’imaginent que leur action est soutenue par la population et que leurs contraventions sont contestables en cour, prenez la peine d‘écouter l’entrevue avec l’ex-juge Nicole Gibeault (Du début jusqu'à 7m30s). Ça vaut vraiment, vraiment la peine...
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