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Les pénuries de main-d’oeuvre, l'individualisme et le cocooning cannibalisent l’action bénévole ;-(

Dernière mise à jour : 3 avr. 2023

En janvier 2020, on aurait voulu croire que malgré la pandémie « Ça aurait dû ben

aller », mais 3 ans plus tard, force est de constater que certaines activités n’ont

pas été épargnées par la crise notamment, l’apport essentiel

du bénévolat à la vie en société.


Quoi que la pandémie est considérée comme étant sous contrôle, il n’en demeure pas moins que les séquelles laissées sur son passage sont énormes et certaines, possiblement irréversibles.


On na qu’à penser aux conséquences économiques, financières, sociales, culturelles, environnementales, politiques, scolaires, sanitaires, notamment pour la santé mentale. À cela s’ajoute la prolifération de la pensée complotiste, les pénuries de main d’oeuvre, la guerre en Ukraine et finalement - cela pourrait surprendre - le désintérêt d’une partie de la population pour l’action bénévole. Pourquoi ?


1- Le bonheur de « l'habillé mou » confortable dans son cocon.


Pascal Bruckner, philosophe bien connu, a publié un essai avec un titre plutôt révélateur de sa vision de la situation post-pandémique : le Sacre des pantoufles, avec comme sous-titre : Du renoncement au monde. (*1) L’auteur avance l’hypothèse suivante : « Face à cette situation, la doxa veut que le seul recours raisonnable soit de réintégrer le foyer, dernier refuge et protection contre la sauvagerie. Mais la maison de nos jours n’est pas un simple abri, elle est bien davantage: un espace en soi qui supplante et remplace le monde, un cocon connecté qui rend peu à peu superflu toute percée vers le dehors.»


Et encore : « Depuis son canapé, on peut jouir par procuration des plaisirs qu’offraient jadis le cinéma, le théâtre, les cafés. Tout ou presque peut nous être livré à domicile, y compris l’amour. Pourquoi dès lors sortir et s’exposer ?»


Si l’auteur exprime les comportements observés en France, ici, à Montréal les statistiques ne mentent pas : l’achalandage de la STM a diminué de 30%, le retour au centre-ville des télé-travailleurs ne représente que 30% de la fréquentation pré-pandémique des tours à bureaux et des exemples d’allégeance au cocooning extrême n’en finissent plus de corroborer le concept de «renoncement au monde ou repli sur soi»


Poussons plus loin l’analogie. À l’instar des fermetures de restaurants et de petits commerces, on apprenait que 25% des gymnases ont cessé d’opéré et que la fréquentation de certains bars aurait sérieusement diminué. Si ce désintérêt de l’espace public est manifeste pour le travail et les loisirs, qu’en est-il pour le bénévolat ?



2- Le retour des retraités au travail rémunéré : une concurrence déloyale


À l’instar de pénuries de main-d’œuvre chroniques sur l’ensemble du territoire québécois, les bénévoles manquent à l’appel partout. Qu’il s’agisse des évènement sportifs, culturels ou des services de santé rendus par les organismes communautaires, cette rareté s’est exacerbée pendant la pandémie et ne semble pas s’estomper. Prenons l’exemple d’un centre d’action bénévole dans une région du Québec qui offre le service d’accompagnement-transport pour les rendez-vous médicaux. (*2)


En novembre 2022, dans une seule journée, l’organisme a du dire non à une quinzaine de demandes sur les 25 formulées par les usagers qui avaient besoin d’un transport pour se rendre à un rendez-vous médical, soit les deux tiers. La situation devrait s’explique ainsi : parmi la vingtaine de bénévoles qui étaient en service depuis longtemps, une dizaine de ces retraités ont décidé de retourner sur le marché du travail, à la demande des leurs ex-employeurs.


D’autres n’ont pas quitté, mais ont moins de disponibilités. Ou bien ils ont recommencer à travailler à temps partiel ou ils s’occupent de leurs petits enfants en raison du manque de place dans les garderies.


Selon la responsable de ce service, contactée en mars 2023, pour combler les départs, elle a réussi à recruter quelques nouveaux accompagnateurs mais elle est loin d’atteindre le nombre de bénévoles actifs avant le début de la pandémie.


3- Adieu solidarité, rebonjour à l’individualisme...


En décembre 2021, La Presse publiait un article portant sur les changements de comportement apportés par la pandémie. (*3) En outre, la journaliste Catherine Handfield, se questionnait sur l’engouement des gens à donner un coup de mains à la cuisine de la cafétéria communautaire MultiCaf, à un point tel que des employés de la Ville prêtaient main-forte pour livrer les repas. WOW !


Mais, au gré des vagues successives de COVID-19, la normalité aurait - semble-t-il - repris ses droits chez MultiCaf. Selon le directeur de l’organisme, Jean-Sébastien Patrice, «le nombre de bénévoles inscrits – 292 au plus fort de la crise – est revenu au niveau d’avant – 83. Les autres se sont désinscrits parce qu’ils ont recommencé à travailler, parce qu’ils sont fatigués, ou parce que ce n’est plus la saveur du mois ».


Serait-ce le retour du chacun pour soi ? Probablement, si l’on résume les propos d’un doctorant en psychologie sociale.


« On voit ce retour-là dans l’individu, mais je ne crois pas qu’il faut en être déçu : je pense que c’est un phénomène normal », dit d’emblée Rémi Thériault, qui s’intéresse à la compassion, à la bienveillance et à l’altruisme. En période de crise, dit-il, comme lors de catastrophes naturelles, les gens ont tendance à bien réagir et à s’entraider, mais ces efforts durent un temps seulement. On s’habitue, la situation s’améliore, on laisse le gouvernement prendre les choses en main et on revient à notre routine. »


Un constat plus que décevant, des solutions ?


S’il va de soi que d’autres motifs peuvent expliquer ce désintéressement pour le bénévolat, un fait demeure : cette nouvelle tendance exacerbée par le cocooning, la concurrence déloyale du marché du travail rémunéré et le retour non désiré de l’individualisme, font en sorte que les organismes tributaires de l’apport des bénévoles pour accomplir leurs missions, devront faire preuve d’ingéniosité pour en recruter de nouveaux, puisque les anciens - comme il a été mentionné précédemment - ont abdiqué.


À ce qui a trait aux solutions, si l’on reprend l’exemple du service d’accompagnement-transport pour les rendez-vous médicaux, la valorisation de l’importance de la cause et des bénévoles qui la soutienne, représente l’une des actions à mettre de l’avant par les organismes communautaires.


Ajoutons à cela, une meilleure connaissance du public cible (bénévoles avec véhicules) pour être en mesure de les joindre directement. Dans le cas spécifique de l’accompagnement-transport sur l’île de Montréal, il y aurait une trentaine d’organismes qui offrent ces services et consciemment ou non, les gestionnaires n’ont d’autre choix que de se livrer à une forme de concurrence pour séduire les bénévoles. Étant pour la plupart de jeunes retraités, il serait envisageable de joindre leurs employeurs ou directions syndicales pour les sensibiliser à l’importance des causes à supporter et mettre en valeur ceux qui y participent.


Une analyse plus précise de la stratégie médiatique à déployer ainsi que les arguments psychologiques à mettre de l’avant pour la production des contenus, feront l’objet d’une seconde publication.


René B.


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Bibliographie, articles de presse.


(*1) Le sacre des pantoufles

Une entrevue sur la télé française Culture Club


(*2) Quand le bénévolat aussi souffre de la pénurie de main-d’œuvre


(*3) Adieu solidarité, rebonjour individualisme




 
 
 

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